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QUE PUIS-JE SAVOIR ?

Tenter de percevoir les mouvements profonds qui décident de la marche de l’histoire.

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Publié le 26 Mars 2015 par Jean Mirguet

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... ça devrait fonctionner !

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Grands et petits espaces

Publié le 26 Mars 2015 par Jean Mirguet dans Villes

Grace au programme http://mapfrappe.com il est possible de comparer, par superposition des cartes, la superficie d’un pays, d’une région ou d’une ville à celle d’un autre pays, d’une autre région ou d’une autre ville.

Voici quelques exemples qui permettent de prendre la mesure d’un état comme la Californie par rapport à la France, ou de Los Angeles par rapport à la région parisienne ou par rapport à Nancy et la Lorraine.

On peut supposer que, de part et d’autre de l’Atlantique, les dimensions des territoires entraînent des rapports à l’espace très différents, eux-mêmes générateurs de divers effets sur les représentations, les mentalités et les façons de faire société.

Les grands espaces sont là où la loi n’est pas encore installée, où règnent les outlaws. Dans Le Père Goriot, Vautrin veut s’établir dans le Sud des Etats Unis, sans être surveillé par l’Etat, en faisant sa propre loi. D’une manière voisine, plusieurs héros de Steinbeck refusent les conventions sociales et sont animés par la volonté profonde d’exprimer leur individualité contre la société

L’attrait américain pour les grands espaces de l’Ouest, objets d’un désir de conquête, sont associés à un désir d’entreprise et d’aventure éloigné du mode de vie français marqué par les petites délimitations individuelles, les clôtures, les distances sociales bien marquées, l’attachement à la petite propriété.

Los Angeles (périmètre bleu) vs Nancy

Los Angeles (périmètre bleu) vs Nancy

Los Angeles (périmètre bleu) vs Paris

Los Angeles (périmètre bleu) vs Paris

La Californie (périmètre bleu) en France

La Californie (périmètre bleu) en France

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Le pas de côté

Publié le 16 Mars 2015 par Jean Mirguet

Le pas de côté

L’écart et l’entre est le titre donné par le philosophe et sinologue François Jullien à sa leçon inaugurale de la Chaire sur l’altérité du Collège d’études mondiales, prononcée le 8 décembre 2011.

Dans ce texte paru aux Editions Galilée en septembre 2012, François Jullien forge le concept d’écart qu’il distingue radicalement de celui de différence, accroché à l’identité.

Pourquoi faire un pas de côté, se démarquer, prendre de la distance, se déplacer, tous termes faisant référence à l’espace ? Ce n’est pas pour introduire une différence mais pour produire un écart qui procède d’une distance quand la différence établit une distinction.

La fonction de l’écart qui produit un espacement est de mettre en tension : c’est en ce point qu’il opère. L’écart est donc productif là où la différence est descriptive.

Du coup l’écart féconde alors que la différence range puisqu’elle suppose que les objets qu’elle différencie appartiennent en amont à un genre commun qui constitue leur soubassement.

Lorsqu’on fait un écart, cet écart peut être une embardée, possiblement génératrice d’un accident. Aussi, faut-il se demander jusqu’où peut aller l’écart c’est-à-dire jusqu’où sortir de la norme, de la route tracée, de ce qui est connu ?

On voit ainsi que l’écart a à voir avec l’aventure, avec la surprise quand elle surgit de l’exploration. Il est peut-être un antidote à l’uniformisation dont nous menace la mondialisation.

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Cet obscur objet du mépris

Publié le 11 Mars 2015 par Jean Mirguet

Dans L’identité malheureuse, Finkielkraut demande si la violence dans les quartiers dits « sensibles » ne serait pas liée à l’exclusion de la féminité, et si elle n’est pas une conséquence du déni de sensibilité et de l’interdiction d’être galant que ces quartiers imposent.

Il cite l’exemple du film de Jean-Paul Lelienfeld, La journée de la jupe. Une prof de français, exaspérée par la violence verbale et les ricanements de certains de ses élèves car elle porte une jupe, réclame l’instauration d’une journée spéciale où l’Etat affirmerait solennellement qu’on peut porter une jupe au collège sans être une « pute ».

Autre exemple : dans Tableau noir. La défaite de l’école, Iannis Roder, un enseignant d’histoire-géo en ZEP, rapporte que celle qui se risque à féminiser sa tenue est considérée comme « une tepu, une tassepé, une lopesa qui mérite de se faire tourner ». Des élèves mêmes confient à leur professeur que s’habiller comme une femme, c’est chercher les problèmes.

La jupe fait de la femme un objet de désir et donc de mépris, écrit Finkielkraut. C’est cette logique épouvantable qui rapproche deux vêtements qu’apparemment tout sépare : le pantalon et le voile. Celles qui ne portent pas le voile doivent porter un pantalon pour cacher leur féminité . Camouflées sous le déguisement masculin d’un survêtement informe, elles échappent aux insultes, on les laisse tranquilles. Certaines ont tôt fait d’intérioriser ces nouvelles normes ; leur langage en atteste, constitué de termes grossiers, vulgaires, troupiers tels qu’on peut les entendre chez les gros bras s’imaginant en avoir. L’unisexualisation (identique à la désexualisation) ou le harcèlement : tel est le choix qui gouverne leur vie.

On nous raconte à longueur de journaux, de radio et de télévision que la violence dans les quartiers est une conséquence de l’exclusion sociale. C’est en partie vrai, mais en partie seulement, du moins du point de vue sociologique. Sous un autre angle, celui de la logique à l’œuvre dans ces fonctionnements, ces événements constituent un effet d’une haine du féminin ou d’un féminin haï car inaccessible qui conduit un jeune de Vitry à railler les « bouffons qui tiennent la main d’une meuf », alors que quelques jours plus tôt, Sohane, une adolescente, a été aspergée d’essence et brûlée vive par celui qu’elle avait éconduit.

C’est ainsi que des petits mâles (beurs salafistes ou nervis bleu-blanc-rouge de la Manif pour tous tabassant les Femen) imbus de leur prétendue supériorité phallique voient leur intégrité masculine menacée et asservissent les femmes.

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L’Angels Flight, d’hier à aujourd'hui

Publié le 6 Mars 2015 par Jean Mirguet dans Los Angeles

Situé au coeur de Downtown à Los Angeles, ce funiculaire fut mis en service en 1901. Durant toute la première moitié du XXe siècle, il permettait aux résidants demeurant dans le quartier résidentiel très convoité de Bunker Hill de rejoindre leurs demeures lorsqu’ils revenaient du quartier commercial qui s’étalait à leurs pieds. Ils pouvaient également utiliser l'escalier de 123 marches qui longeait le funiculaire.

En 1898, au pied de Bunker Hill, quelques années avant la construction de l’Angels Flight

En 1898, au pied de Bunker Hill, quelques années avant la construction de l’Angels Flight

Mise en service en 1901

Mise en service en 1901

L’Angels Flight en 1947, tel que John Fante l’a connu

L’Angels Flight en 1947, tel que John Fante l’a connu

En 1956

En 1956

Dernière nuit de service le 1er janvier 1969

Dernière nuit de service le 1er janvier 1969

L’Angels Flight aujourd'hui

L’Angels Flight aujourd'hui

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La ville de nulle part

Publié le 5 Mars 2015 par Jean Mirguet dans Villes

Dans un de ses récents posts, LAist daily, une newsletter consacrée, entre autres, à la vie culturelle agitant Los Angeles, évoque vingt romans ayant à coeur de raconter une Los Angeles différente des clichés qui, trop souvent, caricaturent cette mégapole … de quoi ravir les amoureux de la Cité des Anges, « ville de lumière et de péché », comme la qualifiait Orson Welles.

Cette Ville de Nulle Part (Alison Lurie) a inspiré de multiples écrivains, autant pour l’aduler que pour l’exécrer. Aussi, l’authentique identité de Los Angeles s’est-elle forgée dans une incroyable et florissante culture, malheureusement trop peu connue. Compte-tenu de la profondeur et de l’ampleur de son héritage littéraire, cette ville s’est dotée d’une richesse incomparable, avec laquelle aucune autre ville ne peut rivaliser.

En conséquence, quelle meilleure manière d’aimer cette ville que de lire cette vingtaine de romans. Imaginez Los Angeles sans sa culture littéraire : que serait une vie à Bunker Hill sans John Fante et Demande à la poussière ? Ou marcher dans Downtown sans penser à Raymond Chandler ? Le paysage angelinien serait-il aussi étonnant, fabuleux et surréaliste sans le Zeroville de Steve Erickson ou Vice Caché de Thomas Pynchon ?

La vingtaine de romans dont la liste suit prouve que Los Angeles est loin de l’image stéréotypée qui habituellement la représente. Cette Babel s’est montrée capable d’inspirer, d’enchanter et de rendre célèbres les écrivains qui sont devenus les plus impitoyables et féroces critiques des poncifs qui la caricaturent.

Southland, de Nina Revoyr

Le Dernier Nabab, de F. Scott Fitzgerald

The Loved One, de Evelyn Waugh

Temps Futurs, de Aldous Huxley

Vice Caché, de Thomas Pynchon

Le Diable en Robe Bleue, de Walter Mosley

Zeroville, de Steve Erickson

American Prophet, de Paul Beatty

Laurier Blanc, de Janet Fitch

Moins que zéro, de Bret Easton Ellis

La Maison des Feuilles, de Mark Danielewski

Le Dahlia Noir, de James Ellroy

America, de T.C. Boyle

L’Incendie de Los Angeles, de Nathanael West

La Medusa, de Vanessa Place

Le Postier, de Charles Bukowski

Demande à la poussière, de John Fante

Le Grand Sommeil, de Raymond Chandler

Maria avec et sans rien, de Joan Didion

Mildred Pierce, de James M. Cain

La ville de nulle part
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Obscurantisme et vandalisme, par André Ropert (L’Express)

Publié le 2 Mars 2015 par André Ropert (L’Express)

Obscurantisme et vandalisme, par André Ropert (L’Express)

Ainsi, nous venons de voir les forcenés de Daech s’acharner sur les antiquités du musée de Mossoul, attaquant à la masse, sinon au marteau piqueur, les vestiges des grandes civilisations mésopotamiennes au motif qu’il s’agissait d’idoles païennes alors qu’Allah est le seul vrai dieu qu’il convient d’honorer. A vrai dire, ils avaient connu un précédent quand d’autres furieux tout aussi fanatiques avaient explosé en Afghanistan, en 2001, les grands Bouddha de Bamiyan classés au patrimoine de l’humanité.

« Que répondre à un homme qui vous dit qu’il aime mieux obéir à Dieu qu’aux hommes, et qui, en conséquence, est sûr de mériter le ciel en vous égorgeant? » s’interrogeait déjà Voltaire en 1764, faisant de manière prémonitoire le portrait parfait du djihadiste façon Daech. Que répondre à un homme qui croit plaire à son dieu en anéantissant des objets qui témoignent, au-delà des millénaires, tant du geste créatif de l’artiste inconnu qui les a produits que d’une quête de cette transcendance que l’imbécile casseur s’imagine servir ? De quelle ignorance, de quelle incapacité à dépasser leurs formules récitées sont porteurs ces abrutis bornés, dont la science religieuse se limite à vociférer « Dieu est grand ! » en décapitant leurs prisonniers ou en brisant des œuvres d’art. Si c’est là la grandeur de Dieu, elle nous donne une bien triste idée de la divinité !

Il est évidement facile d’imputer au seul islamisme radical des comportements aussi absurdes. On ne prête, dit-on, qu’aux riches. Mais cela constaté, n’est-ce pas plus largement le procès de tous les fanatismes qu’il faut instruire ?

Qu’est-ce que le fanatisme ? "Pas une erreur, nous dit J-J. Rousseau, mais une fureur aveugle et stupide que la raison ne retient jamais". Ancré dans la conviction de détenir l’unique vérité et son corollaire : la certitude que quiconque pense autrement n’est pas digne d’exister, le fanatique est irrépressible. Inutile de tenter de discuter ou de négocier : il sait, il sait aussi que vous devriez savoir et que votre ignorance est coupable ; il est au service du bien, vous vous complaisez dans la soumission au mal. Il considère aussi que tout ce qui s’est dit ou fait avant que s’impose la suprématie du bien qu’il incarne est caduc et nuisible. En conséquence, il élimine aussi bien le mécréant qu’il anéantit tout vestige d’un passé (ou d’un présent) qui ne peut qu’être qu’erreur.

Il serait donc injuste de réserver à l’islam, même fondamentaliste, le monopole de ces comportements. Le Livre des rois de la Bible est empli de violences qui ressemblent beaucoup à celles dont Daech se rend aujourd’hui coupable et Jéhu, prenant Samarie, y fait briser la statue de Baal. Les premiers chrétiens ne sont guère plus modérés quand l’occasion s’en présente, et si le Polyeucte de Corneille s’attire tant d’ennuis, c’est qu’il est allé casser dans le temple les statues des dieux… En des temps moins lointains, la Querelle des images, qui agite l’Empire byzantin aux VIII° et IX° siècles après que l’empereur Léon III l’Isaurien ait voulu bannir toute représentation du sacré, entraîne la destruction de nombre d’icônes, de mosaïques d’une immense valeur artistique, en particulier dans la basilique Ste Sophie de Constantinople. Une nouvelle bouffée iconoclaste secoue la chrétienté lors de la Réforme. Calvin ayant dénoncé le risque d’idolâtrie, les Protestants saccagent les églises des villes qu’ils occupent lors des guerres de religion, cassant les statues, brisant les rétables et les reliquaires, détruisant des chefs d’œuvre des âges roman et gothique en les déclarant sacrilèges.

Mais « la fureur aveugle et stupide », comme dit Rousseau, n’est pas l’apanage des seuls fanatiques religieux. Il existe aussi un vandalisme de nature politique qui accompagne souvent les troubles révolutionnaires. A son pire moment, la Révolution française a mis à mal un patrimoine artistique accusé d’être le véhicule de la tyrannie et de la superstition, ce qui a conduit à des événements comme le saccage de la nécropole royale de Saint Denis ou la mise à bas de la galerie des rois d’Israël et de Juda à Notre-Dame de Paris, dont les statues actuelles sont des copies du XIX° siècle. La révolution russe n’a pas fait mieux et que dire de la frénésie destructrice de la révolution culturelle chinoise, orchestrée par Mao-Tsé-Toung, s’acharnant contre les «vieilleries » ? De leur côté, certains des régimes totalitaires du XX° siècle s’en sont pris pour des raisons idéologiques à des œuvres plus contemporaines comme ce fut le cas dans l’Allemagne nazie, brûlant les tableaux de « l’art dégénéré » jusqu’à ce que Goebbels découvre qu’il pourrait en tirer de l’argent en les vendant à l’étranger, ce que réaliseront peut-être (espérons-le) les dévastateurs de Daech.

En 1794, alors qu’il est député à la Convention, l’abbé Grégoire, témoin atterré des destructions de chefs d’œuvre du passé, déclare courageusement : « Les barbares et les esclaves détestent les sciences et détruisent les monuments des arts, les hommes libres les aiment et les conservent! ».

Une formule qui reste d’actualité quand on constate aujourd’hui combien soumission à l’obscurantisme et barbarie mortifère et dévastatrice se confondent.

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