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QUE PUIS-JE SAVOIR ?

Tenter de percevoir les mouvements profonds qui décident de la marche de l’histoire.

Indignez-vous ?

Publié le 17 Mars 2013 par Jean Mirguet in Politique

Stéphane Hessel est décédé le 27 février dernier. Nul ne contestera le courage de cet homme dont la vie et l’itinéraire inspirent le respect. Le lendemain de sa mort, tous les journaux (ou presque) célébraient l’exemple de bravoure qu’il était devenu, son intarissable énergie et son optimisme inépuisable ayant fait de lui un héros comme il n’en existe plus.

Cependant, on ne peut manquer de s’interroger sur les effets de son discours et de ses publications, spécialement le succès mondial de son Indignez-vous !, opuscule d’une grande faiblesse argumentative, construit sur de bonnes et louables intentions mais d’un angélisme quelque peu déconcertant.

Sans doute, le chemin de Stéphane Hessel était-il, comme l’enfer, pavé des meilleures intentions du monde, celles qu’habitent en général les belles âmes de gauche dont l’humanisme neu-neu permet d’éviter de prendre en compte la violence des rapports humains. Cet humanisme ne manque pas d’offrir un certain confort et du repos à ceux qui choisissent d’éviter d’affronter le problème du rapport de l’homme avec l’homme, question politique fondamentale.

Le philosophe et essayiste Jean-Claude Milner ramène cette question politique à la question des corps et de leur survie (voir son dialogue avec Alain Badiou, Controverse, publié au Seuil à l’automne) ; il fait commencer la politique avec la mise en suspens de la mise à mort de l’autre, c’est-à-dire parler plutôt que tuer. Cela suppose, précise-t-il, que la politique soit habitée par la division, la division inhérente à l’être parlant. C’est à cette condition que les tueries peuvent être réellement évitées. Donc, ce qui est politique n’est pas ce qui harmonise mais ce qui divise. La politique n’est pas l’oubli ou l’occultation des problèmes, ce n’est pas Labiche et son Embrassons-nous, Folleville !

Si on ramène la politique à sa nature essentiellement divisible, elle est antihumaniste. A trop parler d’humain et d’humanisme lorsqu’on se flatte de parler politique, n’en vient-on pas à dire réellement : « Fermez votre gueule sur la politique, dégagez il n’y a rien à voir » ... Sans qu’il l’ait voulu, n’est-ce pas un désengagement que risque de produire,  paradoxalement, le discours de Stéphane Hessel ?

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O
Plus surprenant que l'angelisme du livre, l'engouement démesuré pour le livre m'avait paru inquiétant. Je comprends mieux...
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