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QUE PUIS-JE SAVOIR ?

Tenter de percevoir les mouvements profonds qui décident de la marche de l’histoire.

Psychanalyste ou chroniqueur ?

Publié le 16 Février 2013 par Jean Mirguet dans Psychanalyse et psychanalystes

Les psys sont depuis une dizaine de jours les destinataires d’une intense campagne médiatique menée par Jacques-Alain Miller, psychanalyste et chroniqueur du Point.

Se construisant la stature d’un personnage public qui veut compter sur la scène nationale et au-delà, il a engagé sa fougue et son énergie dans la défense de la cause de Mitra Kadivar, psychanalyste iranienne, présidente de la Freudian Association de Téhéran, selon lui injustement hospitalisée dans une institution psychiatrique de Téhéran pour des motifs politiques. Et de se battre, avec ses fidèles et dévoués suiveurs, pour demander la remise en liberté de notre collègue.

Une pétition est lancée, cosignée avec BHL : elle recueille les signatures de personnalités du monde de la psychanalyse, des arts, de la politique (Carla Bruni-Sarkozy, Jean-Luc Mélenchon, Philippe Sollers, Jean-François Copé), des people qui couchent leur nom au bas de cette pétition qui, à ce jour, aurait recueilli plus de 4000 signatures.

Bien que ne connaissant pas l’Iran et n’y étant jamais allé, JAM paraît ne pas vouloir tenir compte d’informations différentes émanant d’autres sources et indiquant que, dans cette affaire, nous ne sommes pas en présence d'un internement abusif, lié à une position politique que Madame Kadivar  aurait prise. Celle-ci serait « simplement » soignée dans le service du professeur Gadhiri (tenu au secret professionnel) pour un épisode psychotique.

Compte tenu des risques de confusion résultant de ce mouvement de protestation qui fait de la souffrance réelle de Madame Kadivar un acte de résistance à l'encontre des islamistes, plusieurs psychanalystes iraniens ont exprimé leur inquiétude quant aux conséquences que pourrait avoir, pour eux et pour le professeur Ghadiri, cette campagne menée depuis la France.

Pour le Dr Foad Saberan, né à Téhéran et psychiatre à Paris, « en Iran, les tenants de la théorie du complot universel vont s’en donner à cœur joie après la grosse bourde criminelle des initiateurs de cette pétition en « faveur » de Mitra Kadivar. La voilà promu au rang « d’agent de l’étranger », porteuse d’une « science du sexe » qui n’est que perversion de l’Occident. Qui portera la responsabilité de ce que les psys iraniens vont subir ? Déjà mes confrères iraniens fulminent contre ceux qui profitent d’un malheur pour pointer les projecteurs sur une profession qui ne demande qu’à travailler dans la discrétion et le silence, au profit des patients. Cette pétition n’aidera ni la malade, ni les confrères compatriotes d’Avicenne ».

Pourtant, JAM n’en démord pas et continue son étonnante croisade, dont on se demande, à lire les communiqués de victoire des flagorneurs habituels, si, sous le couvert de cette malheureuse affaire, elle ne vise pas à faire parler de soi coûte que coûte ou à faire sa promo c’est-à-dire faire le buzz, cette technique marketing consistant à faire du bruit autour d'un événement, d’un nouveau produit ou d'une offre.

Fin janvier, à l’occasion du débat autour du mariage pour tous, JAM s’était déjà illustré avec une longue et verbeuse lettre ouverte à Henri Guaino, publiée dans Le Point. Il ne semble pas qu’elle ait produit beaucoup d’effet.

JAM fait beaucoup de bruit, pas toujours pour rien, c’est entendu. Mais ce bruit parasite, de plus en plus. Aurait-il oublié ce que disait le fameux ingénieur du son qu’était Lacan : il pensait que le bruit ne convient pas au psychanalyste et moins encore au nom qu’il porte et qui ne doit pas le porter.

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Le traitement de la violence au cinéma (suite), par Jacques Rimbert

Publié le 14 Février 2013 par Jacques Rimbert dans Cinéma

Merci pour cet article, Jean...Je n'ai pas encore vu le film de Tarantino et j'avais, plus ou moins intentionnellement boycotté Funny Game à l'époque. Mais au-delà des deux films et des deux réalisateurs cités, ton analyse pose avec justesse le problème du traitement de la violence au cinéma... Montrer ou ne pas montrer... Quoi montrer?

Entre complaisance, effroi ou jouissance...

Quelques réflexions... subjectives... mais peut-il en être autrement?

Je n'avais guère supporté la complaisance avec laquelle, dans Réservoir Dogs, Tarantino nous montrait la torture infligée (entre autre, une oreille coupée) par un psychopathe à un autre gangster. De quoi s'agissait-il? De nous montrer de la façon la plus réaliste (effet de réel assuré en tout cas), sans stylisation, ce qu'est la violence perverse ? Et dans quel but ? Notre imagination y suffit. Ou à pousser le bouchon de la représentation le plus loin possible pour faire du buzz et du public?

Tarantino rêverait, paraît-il, que ses films provoquent un orgasme chez les spectateurs. C'est bien cet effet de jouissance qui doit être interrogé.

Dans Inglorious Bastards, deux scènes me semblent emblématiques de deux façons d'utiliser la violence comme vengeance.

La scène où un soldat allemand, agenouillé donc devenu « victime », attend le châtiment que doit lui infliger « l'ours juif » (!!!), tandis que résonnent les coups de batte de base-ball heurtés sur les murs du tunnel d'où doit sortir « l'ange exterminateur » me fait encore froid dans le dos. De quoi s'agit-il ? De montrer ou de faire imaginer (ici, c'est encore plus terrible) une contre-violence et une horreur, justifiées par la barbarie nazie ou de la dénoncer au même titre? C'est terrifiant. Même si on peut expliquer que la barbarie appelle la barbarie, il s'agit là, de la montrer dans un contexte qui fait appel à la sympathie du spectateur pour le psychopathe (l'intention contraire m'aurait échappé). Pourquoi, dans le même esprit, ne pas montrer une scène de torture infligée à un salaud et en faire insidieusement l'apologie ?

A l'inverse, la scène du cinéma qui voit brûler vif tout l'état major de Hitler, par sa mise en scène d'opéra bouffe, le sens supplémentaire d'allégorie qui lui est donné par la surimpression de la jeune fille, à la fois brûlée ( rappel des crimes nazis) avec la pellicule et ange de vengeance m'a procuré un vrai plaisir...

Qu'est-ce qui me gêne tant dans la première scène? La représentation de la torture ainsi infligée (la tête « explosée » à plusieurs reprises par les coups) que je phantasme et ressens physiquement et la jouissance tranquille de ceux qui la commettent. Ce qui aurait pu me procurer un sentiment de plaisir lié à une « juste vengeance », donc à une « juste violence », a cédé la place à une nausée. Me manque la justice.

A l'inverse, la dernière scène me donne ce sentiment.

Dans tous les cas, et le procédé que tu mentionnes dans Funny game semble aller dans le même sens, la violence montrée n'est supportable que si l'on a le sentiment, en amont, que celui qui la montre a réfléchi sur le sens à lui donner...

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Raoul, poète de la Cité des Anges

Publié le 13 Février 2013 par Raoul Mirguet dans Poésie

Poème de Raoul
Neige
qui tombe
toute douce
comme un tas de laine dans une boule
coulant entre tes mains
légère
mais fragile
comme une barbe à papa blanche
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Une Bonne Nouvelle : la révolution dans la famille

Publié le 4 Février 2013 par Jean Mirguet dans Religion

Sainte familleDans le dernier numéro de la revue Etudes, Michel Serres, philosophe, historien des sciences et membre de l’Académie française développe dans un passionnant article intitulé « La saine famille » l’idée ancienne que, pour l’Eglise catholique, la famille n’est plus et ne peut plus être le fondement de la société civile, juridique et politique.

Ce n’est pas le cas de nombreuses autres cultures où, à l’inverse, la famille reste le fondement de la société, de la politique et du droit. De là viennent les luttes qui opposent, souvent violemment, les tribus, les castes ou les clans. Du coup, cette version de la famille porte la responsabilité de la première corruption puisque les lois sont détournées au bénéfice des parents ou des héritiers, il n’y a pas d’égalité devant la loi dès lors que le fonctionnaire n’est pas séparé de sa fonction : il peut léguer son poste et son rôle social à ses enfants. Donc tous les abus et les corruptions sont possibles (cf. la famille Ali en Tunisie ou Moubarak en Egypte, les multiples oligarchies de par le monde).

C’est pour séparer l’office du bénéfice que l’Eglise catholique édicta, au XIe siècle, l’obligation de célibat des prêtres en vue d’éviter les influences et les querelles opposant les familles puissantes qui cherchaient à obtenir des postes et à s’approprier le pouvoir.

Ainsi, quand l’Eglise devint un Etat, celui-ci cessa d’être fondé sur la famille qui, de fait, constituait un obstacle à la démocratie. L’Eglise catholique mit donc en pratique cette idée que la famille n’était plus le fondement de la société qu’elle construisait.

Michel Serres appuie sa démonstration sur l’innovation anthropologique produite par la Sainte Famille  où Jésus n’est pas le fils et ne naît pas de Joseph qui n’est pas le père puisque sa mère, vierge, conçut du Saint-Esprit. Autant dire que, dans cette famille, les liens structuraux de la parenté sont défaits, ce que signifie l’adjectif « sainte » qui la qualifie : les relations de sang sont démantelées.

En conséquence, les chrétiens reconnaîtront comme un(e) des leurs toute femme ou tout homme qu’ils appelleront frère, père, mère ou sœur quiconque n’est justement ni son frère, ni son père, ni sa mère, ni sa sœur mais qui a choisi librement devenir tel. Cette reconnaissance fait du christianisme l’opérateur majeur de la déconstruction des liens de la parenté naturelle ou de sang : « (...) devenir enfants de Dieu. Ceux-là ne sont pas nés du sang, ni d’un vouloir de chair ni d’un vouloir d’homme, mais de Dieu » (Jean, 1, 12-13). Pourquoi, par conséquent, s’obstiner à défendre, aujourd’hui, le caractère naturel de la famille quand, à la nécessité physique de naître du ventre d’une femme, le christianisme substitue la liberté individuelle de l’amour et du choix ? Si l’on ne devient juif que par sa mère, on devient chrétien par choix et adoption : libre à chacun de devenir le fils adoptif de Dieu.

Michel Serres en déduit que, pour le christianisme, la dilection adoptive joue le rôle d’unique structure élémentaire de la parenté. C’est une révolution majeure en ce qu’elle supprime la possibilité de tout racisme, fondé sur les liens de sang.

Que nous soyons croyants ou non, force est de reconnaître que cette Bonne Nouvelle s’impose à nous puisque la transformation du système symbolique de parenté opéré par le christianisme annonce, écrit Michel Serres, le début d’une culture moins violente, plus apaisée quoique encore rarement réalisée parmi nous.

« Voici le début d’une histoire juste, d’un monde nouveau, de collectifs enfin équitables envers nos compagnes et nos frères homosexuels », conclut-il. « L’Eglise engendra la société moderne et cette modernité perpétue, souvent sans le savoir, les données du christianisme ». Contre cela, les réactionnaires ne peuvent rien.

 

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Quentin Tarentino contre Michael Haneke

Publié le 3 Février 2013 par Jean Mirguet dans Cinéma

Le nouveau film de Tarantino, Django Unchained, se dérouleDjango quelques années avant que n’éclate la guerre de Sécession qui mettra fin à l’esclavage aux Etats-Unis. Avant que ne se déclenche la Guerre civile américaine, Tarantino nous propulse sans ménagement au cœur de la barbarie esclavagiste du Sud, en ne lésinant pas sur les scènes de violence, sur les gros plans gore où giclent le sang, les entrailles, les os explosés par les balles de revolver.

Ce film est une histoire d’empowerment, comme le note Isabelle Regnier, la critique du Monde. L’empowerment est un mécanisme par lequel une personne acquiert la maîtrise des événements qui la concernent. C’est une façon de s’approprier son propre pouvoir face à un groupe dominant, ce que ne se prive pas de faire Django qui se déchaîne contre les négriers, pendant les 2h44 de projection .

Cette mise en scène d’une vengeance des opprimés, grâce à la fiction, est évidemment jouissive et le spectateur a tôt fait de s’identifier à Django dans sa lutte pour conquérir sa liberté et libérer son aimée des griffes de son propriétaire Calvin Candie, interprété par l’excellent Leonardo DiCaprio.

Toutefois, une fois sorti de la salle de cinéma, nous reste-t-il de ce film autre chose que le souvenir d’un excellent spectacle cinématographique ? Car reste la question du rôle de la fiction dans la représentation de la violence.

A l’opposé de Tarantino, Michael Haneke estime que la question n’est pas de savoir ce que le cinéma a le droit de dévoiler mais comment il permet au spectateur de comprendre ce qu’on lui montre. Aussi, développe-t-il dans ses films comment la violence arrive et se propage, construisant sa mise en scène de telle manière que ce à quoi s’attend le spectateur n’est pas montré. Il ne montre pas ce que le spectateur a envie de voir : cela reste hors-champ. La violence est d’autant plus présente qu’elle n’est pas montrée.

Funny gamesDans Funny games sorti en 1997, Haneke raconte l’histoire d’un couple, de leur fils et leur chien qui partent passer quelques jours dans leur maison de campagne près d'un lac. En passant devant la maison de leurs voisins, ils s'étonnent de la présence de deux jeunes gens. À peine arrivés dans leur propre logement, l'un de ces deux jeunes vient leur demander un service ; il se comporte avec une grande politesse, mais son attitude suscite un certain malaise : ayant pris en main le portable de la mère, il le laisse tomber, par une feinte maladresse, dans l'évier rempli d'eau. Les deux intrus vont progressivement adopter un comportement de plus en plus violent et prendre la famille en otage... 

Yannick Rolandeau, qui commentait récemment ce film sur France Culture, rapporte la fameuse scène du rembobinage dans laquelle Anna prend le fusil et tue l’un de ses bourreaux. A ce moment, un autre personnage resté vivant demande où est la télécommande. Pourquoi ? On ne comprend pas bien. Haneke laisse un peu de temps pour qu’on ait bien pris conscience qu’un des personnages était mort. Il le fait alors renaître par le rembobinage du film jusqu’au moment où Anna prend le fusil. Le film recommence donc mais Anna ne pourra pas reprendre le fusil.

Avec ce dispositif, Haneke montre que la fiction possède ce pouvoir d’amener le spectateur à approuver des crimes symboliques et à se venger symboliquement. La fiction est tellement forte qu’elle capte le spectateur mais, dans le cinéma d’Haneke, c’est à la condition, qu’elle ne montre pas ce à quoi s’attend le public.

Pour Haneke qui, souvent, dénonce la violence dans les films de Tarantino, s’engager dans une inflation de la violence risque de lasser le spectateur qui en voudra toujours plus. A terme, tout montrer aboutit à la mort de la fiction alors que s’attendre à voir de la violence sans qu’elle soit filmée pousse le spectateur à s’interroger sur les raisons de sa frustration de ne pas voir.

Quand Hamlet fait représenter une pièce de théâtre où il accuse sa mère de meurtre, c’est dans le but de lui faire comprendre qu’elle n’a pas agi noblement. Il en passe par une fiction dans la pièce de théâtre pour lui dire de biais ce qu’il ne peut lui dire ouvertement. C’est la preuve de l’impact de la fiction dont l’existence démontre qu’on ne peut accéder directement au réel, qu’il faut en passer par la représentation mais une représentation qui détrompe, qui démystifie.

La fiction a autant de réalité que la réalité elle-même, elle génère ce que Barthes appelait « l’effet de réel », proche de l’effet de vérité engendré par le langage. Le fictif n’est pas différent du symbolique ; il a pour effet de donner au spectateur le sentiment que le film le plonge dans le monde réel, d’où l’inquiétante étrangeté qui traverse les films d’Haneke, mais dont les films de Tarentino sont dépourvus.

Nietzsche affirmait  que « nous ne savons rien du réel, si ce n’est à travers les constructions fictives qui sont celle que le langage permet ». Nul doute qu’il en va de même pour le langage cinématographique, avec des effets de réel très différents selon qu’on s’appelle Tarentino ou Haneke.

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Un nouvel usage du père ?

Publié le 1 Février 2013 par Jean Mirguet dans Le malaise

MPTOn connaît l’aphorisme provocateur de Lacan : « Il n’y a pas de rapport sexuel », formule emblématique d’une impossible jouissance et d’une chimérique complémentarité homme - femme, voués à ne jamais s’entendre, ce pourquoi la plupart d’entre eux passent leur vie à se chercher ... et, quelquefois, à se rencontrer. Le sujet, dans l'acte sexuel, ne rencontre ni l'objet de son désir que l'autre paraît représenter pour lui, ni la complétude qu'il escompte d'une telle expérience.

Dans un post récent, à propos du mariage pour tous, publié par une association de psychologues orientés par les hypothèses de Freud et Lacan, on peut lire que les psychanalystes qui auraient l’idée farfelue qu’il leur faudrait avoir tous le même avis sur la très actuelle question du mariage pour tous, valable pour toute la planète psy, feraient mieux de se taire. Aussi jugent-ils fâcheux, à juste titre, l’utilisation qui est faite du savoir psychanalytique pour cautionner, dans les polémiques, les thèses opposées au projet de loi. Combattre le mariage pour tous au nom du critère de la différence naturelle des sexes est une billevesée et ne vaut pas mieux que débiter des coquecigrues puisque s’il n’y a pas d’appariement naturel entre elle et lui, ils sont destinés à rester des désassortis et à ne s’associer que par le fantasme : il n’y a pas de rapport sexuel.

Les psychanalystes opposés au mariage pour tous restent pour la plupart d’entre eux arc-boutés sur le sacro-saint Œdipe, soutien d’une conception normative et harmonieuse de la famille, alors que tout l’enseignement de Lacan engage sur la voie consistant à prendre du champ par rapport à ce qui est devenu une idéologie oedipienne (cf. la teneur des débats dans lesquels H. Guaino et d’autres se font les pourfendeurs du projet de loi).

Endossant son habit de père la malice, Lacan affirmera qu’est hétérosexuel celui ou celle qui aime les femmes : les femmes sont toujours autres, fut-ce pour elles-mêmes. De quoi donner des boutons aux militants de la république oedipienne fondée sur le règne éternel du père, à partir d’une vision psychologisante de la famille (avec laquelle la psychanalyse n’a pas grand-chose à voir même si certains psychanalystes médiatiques ont pris leur part dans cette dérive).

Considérant que les psychanalystes n’étaient pas plus les détenteurs des clés de la normalité que de celles de l’anormalité, Lacan a, sans relâche, bouleversé cette vision oedipienne de la psychanalyse en prédisant le déclin de l’Oedipe dans nos sociétés. Il a toujours insisté sur le fait que l’ordre symbolique – dont on fait un usage psychologisant à l’occasion de ce débat - n’était en rien une norme et que chaque sujet s’y rapportait de façon singulière. C’est ainsi que ce qu’on appelle la carence paternelle n’est pas directement liée à l’absence de la personne du père puisqu’un Oedipe peut tout à fait se constituer sans la personne du père. Le père est une fonction qui, certes, doit être incarnée, mais qu’il faut dissocier de sa personne réelle.

Avec l’homoparentalité, s’offre un nouveau scénario : la fonction maternelle n’est plus forcément attribuée à la femme, et la fonction paternelle à l’homme. La fonction parentale est dissociée du biologique, au moins pour l’un des deux parents, et de surcroît il y a lieu de distinguer différence des sexes et parentalité.

La sacro-sainte fonction paternelle soit, dans le jargon des psychanalystes, le rapport du désir à la loi, peut-elle fonctionner si la répartition père-mère ne coïncide pas toujours avec la stricte différence homme-femme ? Il semble bien que oui si l’on en juge par les études portant sur les familles homoparentales où les enfants peuvent trouver, ni mieux ni moins bien que dans les familles hétéroparentales, les identifications qui leur sont nécessaires.

Dans ces conditions, que faire du père ?  Dans une de ses  saillies fulgurantes dont il avait le secret, ce que nous propose Lacan, c’est de s’en servir ... pour s’en passer. A suivre ...

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