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QUE PUIS-JE SAVOIR ?

Tenter de percevoir les mouvements profonds qui décident de la marche de l’histoire.

Les primaires : une affaire de style

Publié le 14 Octobre 2011 par Jean Mirguet in Politique

« Chez Ségolène et Nicolas » : c’est le nom d’une boulangerie qui s’est récemment ouverte près de chez moi.

Surprenant d’associer ces deux prénoms pour en faire un couple ! Étonnant de les mettre en rapport et former ainsi une unité dans laquelle l’un(e) serait le complément de l’autre, faisant ainsi mentir cette vérité énoncée par Jacques Lacan : il n’y a pas de rapport sexuel car il est impossible de l’écrire. Autrement dit, il n’y a pas de rapport naturel dans le lien entre un homme et une femme.

En cette période de primaires, cette vérité vaut pour un autre couple, celui formé par Martine et François, dont précisément la presse s’évertue à débusquer l’inimitié et à démontrer l’impossibilité à faire couple, tout en les mettant constamment en rapport.

S’il n’y a pas de rapport possible entre Ségolène et Nicolas, il n’y en a pas davantage entre Martine et François. Mais la question des désaccords, de la mésentente, des conflits entre les deux présidentiables est ici purement secondaire. Ce qui compte, c’est le style, la manière, la griffe, la marque c’est-à-dire la mise en valeur de ce qui dément toute idée de fabrication standard d’un présidentiable, autrement dit la mise en valeur de l’exception qui se dévoile dans une manière de dire, un bien dire propre à l’énonciation plus qu’à l’énoncé.

 

Dans un texte bref et dense publié ces jours-ci par Mediapart,  Marie Darieussecq , romancière et psychanalyste, prend parti pour la candidate. Comme Arnaud Montebourg ou François Hollande, Martine Aubry possède des qualités qui ne sont, par nature, ni masculines ni féminines. Mais, parce que ce serait nouveau, inédit en France, Marie Darieussecq soutient que devenir une présidente vaut plus, historiquement, que devenir président.

Martine Aubry ne fait pas valoir un quelconque avantage à être femme : la catégorie de genre ne fait pas partie de son argumentaire.

Comment entendre alors la plus-value que Marie Darieussecq lui accorde ?

Je propose de  l’apprécier comme le supplément et non comme le complément d’un tout. La structure d’un tout peut comporter un manque que le complément viendra remplir ou se présenter comme une succession sans limites d’éléments, donc ne formant pas une totalité fermée, autrement dit un pas-tout.

Pour Jacques Lacan, le pas-tout se rapporte à la sexuation féminine ; il est le lieu d’inscription du supplément, de ce qui est en plus, de ce qui accroît.

 

Envisager le duel entre les deux candidats sous cet angle permet, me semble-t-il, de ne pas s’égarer dans les scenarii de compétition, de rivalité dont les médias sont si friands.

C’est ici qu’intervient le style comme indice de l’exception et de ce qui est en supplément, ce qu’une position féminine incarne autrement voire mieux que ne sait le faire une position masculine.

C’est là affaire de structure, de réel avec lequel il s’agit de savoir y faire.

Martine Aubry doit bien en savoir quelque chose pour affirmer que François Hollande est le candidat du système...phallique aurait-elle pu ajouter.

 

A l’issue du débat de mercredi soir, nous avons été nombreux à penser que, quelle que soit l’issue du vote de dimanche, l’une ou l’autre, avec son style propre, allait donner la victoire à la gauche.

Mais le style de l’une, c’est de personnifier l’Autre du petit autre qu’est l’homme. C’est en quoi, plus que le candidat masculin François Hollande, Martine Aubry symbolise le changement.

A chacun de faire son choix. J'opterai, quant à moi, pour une femme de gauche, comme nous y invite Marie Darieussecq, puisque, femme singulière, Martine Aubry incarne ce changement.

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F
<br /> Vu d'ailleurs et de l'étranger, la bataille Aubry-Hollande et sur la possibilité d'une femme présidente, fait penser à Obama, 1er président noir porteur aus Etats Unis d'immenses espoirs et<br /> aujourd'hui d'autant de déceptions. Ce ne sera donc pas Aubry, reste à Hollande a combler le pas-tout, dur dans ce monde, comme disait Cartier Bresson où il y a trop de tout.<br /> <br /> <br />
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M
<br /> Cher Monsieur, je trouve votre article très juste dans sa concision (art qui m'est difficile). Vous posez le débat en termes clairs et efficaces. Pas de symétrie entre ces candidats, en effet, ni<br /> même de complémentarité. Il s'agit d'autre chose, malheureusement peu accessible à la plupart des journalistes, je le crains. Et sans doute aux candidat.e.s eux.elles.mêmes (voyez à quoi m'oblige<br /> la langue française...)<br /> Bien cordialement.<br /> Marie D.<br /> <br /> <br />
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